Le processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique

L'obésité est devenue un problème majeur de santé publique à l'échelle mondiale, avec une prévalence qui a presque triplé depuis 1975. En 2016, plus de 650 millions d'adultes étaient considérés comme obèses selon l'Organisation Mondiale de la Santé [1]. L'obésité sévère, définie par un indice de masse corporelle (IMC) supérieur ou égal à 40 kg/m² ou un IMC ≥ 35 kg/m² associé à au moins une comorbidité, est particulièrement préoccupante en raison de son impact considérable sur la mortalité, la morbidité et la qualité de vie. Face à cette épidémie et aux limites des approches thérapeutiques conventionnelles, la chirurgie bariatrique s'est progressivement imposée comme une option thérapeutique efficace pour les patients souffrant d'obésité sévère.

Le processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique

La chirurgie bariatrique englobe différentes techniques chirurgicales visant à réduire l'absorption des nutriments et/ou à diminuer la capacité gastrique, entraînant ainsi une perte de poids significative et durable. Les études à long terme démontrent non seulement une réduction pondérale substantielle, mais également une amélioration, voire une rémission, de nombreuses comorbidités associées à l'obésité, telles que le diabète de type 2, l'hypertension artérielle, l'apnée du sommeil et certaines dyslipidémies [2]. Cependant, ces interventions ne sont pas dénuées de risques et nécessitent une modification profonde et permanente des habitudes alimentaires et du mode de vie.

Dans ce contexte, le processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique revêt une importance capitale. Il vise à identifier les patients qui bénéficieront le plus de l'intervention tout en minimisant les risques de complications et d'échecs à long terme. Ce processus complexe repose sur une approche multidisciplinaire intégrant des évaluations médicales, nutritionnelles, psychologiques et sociales. La sélection des candidats appropriés ne se limite pas à l'application de critères d'éligibilité standardisés, mais implique une analyse approfondie du profil individuel de chaque patient, de ses comorbidités, de son comportement alimentaire, de sa motivation et de sa capacité à adhérer aux recommandations post-opératoires.

Cet article propose une analyse détaillée du processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique, en explorant successivement les critères médicaux d'éligibilité, l'évaluation psychologique et comportementale, le parcours préopératoire multidisciplinaire, la préparation préopératoire et les considérations éthiques et socio-économiques qui influencent ce processus. L'objectif est de fournir une vision globale et actualisée des différentes étapes de sélection, en soulignant leur importance pour optimiser les résultats à long terme et minimiser les risques associés à ces interventions.

Critères médicaux d'éligibilité à la chirurgie bariatrique

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La sélection des candidats à la chirurgie bariatrique repose avant tout sur des critères médicaux précis, établis par diverses sociétés savantes internationales. Ces critères ont évolué au fil du temps, reflétant l'amélioration des connaissances scientifiques et l'extension progressive des indications de la chirurgie bariatrique.


L'indice de masse corporelle (IMC) demeure le critère anthropométrique principal. Initialement, les recommandations issues de la conférence de consensus du National Institutes of Health (NIH) de 1991 préconisaient la chirurgie bariatrique pour les patients présentant un IMC ≥ 40 kg/m² ou un IMC ≥ 35 kg/m² associé à au moins une comorbidité significative liée à l'obésité [1]. Ces seuils restent largement adoptés dans la plupart des pays, bien que certaines sociétés savantes, notamment la Fédération Internationale pour la Chirurgie de l'Obésité (IFSO), aient récemment proposé d'élargir les indications aux patients ayant un IMC entre 30 et 35 kg/m² avec un diabète de type 2 mal contrôlé. Cette évolution s'appuie sur des données probantes démontrant l'efficacité de la chirurgie métabolique dans la rémission du diabète de type 2, indépendamment de la perte de poids [3].


Les comorbidités associées à l'obésité constituent le deuxième pilier des critères médicaux d'éligibilité. Parmi celles-ci, le diabète de type 2, l'hypertension artérielle, les dyslipidémies, le syndrome d'apnée obstructive du sommeil, la stéatose hépatique non alcoolique, les troubles articulaires dégénératifs et certaines pathologies cardiovasculaires sont particulièrement pris en considération. La sévérité de ces comorbidités, leur réponse aux traitements médicaux conventionnels et leur impact sur la qualité de vie du patient influencent considérablement la décision chirurgicale. Par exemple, un diabète de type 2 mal contrôlé malgré une thérapeutique médicamenteuse optimale représente un argument de poids en faveur d'une intervention bariatrique, compte tenu des bénéfices métaboliques démontrés de la chirurgie.


L'échec des traitements conventionnels de l'obésité constitue également un prérequis essentiel. Les candidats à la chirurgie bariatrique doivent généralement avoir entrepris, sans succès durable, plusieurs tentatives de perte de poids par des approches non chirurgicales, incluant les modifications du mode de vie (régime alimentaire, activité physique), les thérapies comportementales et, le cas échéant, les traitements pharmacologiques de l'obésité. Cette exigence vise à réserver la chirurgie aux patients pour lesquels les alternatives thérapeutiques moins invasives se sont avérées insuffisantes. Toutefois, l'interprétation de ce critère varie considérablement selon les équipes et les contextes nationaux, certains exigeant une documentation précise des tentatives antérieures, tandis que d'autres adoptent une approche plus pragmatique.


Enfin, les contre-indications médicales doivent être soigneusement évaluées. Elles incluent les conditions susceptibles d'augmenter significativement le risque opératoire ou de compromettre l'adhésion aux recommandations post-opératoires. Parmi ces contre-indications figurent certaines pathologies cardiopulmonaires sévères, les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin, les cirrhoses décompensées, les néoplasies actives et certaines maladies psychiatriques instables. L'âge constitue également un facteur à considérer, bien que les limites d'âge traditionnelles (18-65 ans) soient de plus en plus remises en question, notamment pour les adolescents souffrant d'obésité sévère et certains patients âgés sélectionnés.


L'évaluation de ces critères médicaux nécessite une approche individualisée, prenant en compte non seulement la présence de ces facteurs, mais également leur sévérité, leur évolution temporelle et leur impact global sur le rapport bénéfice-risque de l'intervention chirurgicale envisagée.

Évaluation psychologique et comportementale

L'évaluation psychologique et comportementale constitue une composante fondamentale du processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique. Cette évaluation vise à identifier les facteurs psychologiques susceptibles d'influencer l'adhésion aux recommandations post-opératoires et, par conséquent, les résultats à long terme de l'intervention.


Le dépistage des troubles psychiatriques représente la première étape de cette évaluation. La prévalence des comorbidités psychiatriques est significativement plus élevée chez les patients obèses candidats à la chirurgie bariatrique que dans la population générale, avec une prépondérance des troubles de l'humeur, des troubles anxieux et des troubles du comportement alimentaire. Une méta-analyse récente a révélé que près de 23% des candidats à la chirurgie bariatrique présentaient un trouble dépressif et 17% un trouble anxieux [2]. Ces troubles ne constituent pas nécessairement une contre-indication absolue à la chirurgie, mais leur identification préopératoire est essentielle pour mettre en place un suivi psychiatrique adapté et optimiser la préparation du patient. En revanche, certaines pathologies psychiatriques sévères et non stabilisées, telles que les troubles psychotiques, les troubles bipolaires non équilibrés ou les troubles de la personnalité borderline sévères, peuvent représenter des contre-indications relatives ou absolues, en raison du risque accru de décompensation post-opératoire et de difficultés d'adhésion aux recommandations.


L'évaluation du comportement alimentaire occupe une place centrale dans l'examen psychologique préopératoire. Les troubles du comportement alimentaire, notamment l'hyperphagie boulimique (binge eating disorder), le grignotage compulsif ou l'alimentation émotionnelle, sont fréquemment observés chez les candidats à la chirurgie bariatrique et peuvent compromettre significativement les résultats post-opératoires s'ils ne sont pas pris en charge de manière adéquate. L'utilisation d'outils d'évaluation standardisés, tels que le Questionnaire sur les Habitudes Alimentaires (Eating Disorders Examination-Questionnaire) ou l'Échelle d'Alimentation Émotionnelle de Trois-Facteurs (Three-Factor Eating Questionnaire), permet d'objectiver ces comportements et d'orienter les interventions thérapeutiques préopératoires. La compréhension des déterminants psychologiques du comportement alimentaire, notamment le rôle de l'alimentation comme stratégie de régulation émotionnelle, est également cruciale pour anticiper les difficultés potentielles après l'intervention.


La capacité d'adhésion aux recommandations post-opératoires constitue un autre aspect déterminant de l'évaluation psychologique. La chirurgie bariatrique impose des modifications profondes et durables du mode d'alimentation, nécessitant une discipline quotidienne et une vigilance constante. L'évaluation de la capacité du patient à suivre ces recommandations repose sur plusieurs indicateurs, notamment son niveau d'observance thérapeutique antérieur, sa compréhension des contraintes imposées par la chirurgie, son autonomie dans la gestion des soins et son environnement social et familial. Les antécédents d'abus de substances (alcool, drogues illicites) doivent être particulièrement scrutés, en raison du risque accru de transfert d'addiction après la chirurgie bariatrique, notamment vers l'alcool.


Enfin, l'exploration des attentes du patient vis-à-vis de la chirurgie est essentielle pour prévenir les déceptions post-opératoires et favoriser une satisfaction à long terme. Des attentes irréalistes concernant la perte de poids, l'amélioration de la qualité de vie ou la résolution des problèmes psychosociaux peuvent conduire à une insatisfaction, voire à des comportements contre-productifs après l'intervention. L'entretien psychologique préopératoire permet d'identifier ces attentes disproportionnées et d'engager un travail de réajustement, en promouvant une vision réaliste des bénéfices et des limites de la chirurgie bariatrique [4].


Cette évaluation psychologique ne doit pas être conçue comme un simple processus de sélection visant à exclure certains candidats, mais plutôt comme une opportunité d'identifier les vulnérabilités psychologiques et comportementales afin de mettre en place des interventions thérapeutiques ciblées, optimisant ainsi la préparation préopératoire et le suivi post-opératoire.

Parcours préopératoire et évaluation multidisciplinaire

Le parcours préopératoire des candidats à la chirurgie bariatrique s'inscrit dans une démarche multidisciplinaire coordonnée, reflet de la complexité de la prise en charge de l'obésité sévère. Cette approche globale permet d'évaluer précisément les différentes dimensions médicales, nutritionnelles, psychologiques et sociales qui détermineront le succès de l'intervention.


La composition de l'équipe multidisciplinaire constitue le fondement de cette approche intégrée. Si sa configuration exacte peut varier selon les établissements et les contextes nationaux, elle inclut généralement un chirurgien spécialisé en chirurgie bariatrique, un médecin nutritionniste ou endocrinologue, un diététicien, un psychologue ou psychiatre, un anesthésiste et un infirmier coordinateur. Cette équipe peut être complétée, selon les besoins individuels des patients, par d'autres spécialistes tels que pneumologues, cardiologues, gastro-entérologues ou rhumatologues. Des recommandations internationales, notamment celles de l'European Association for the Study of Obesity (EASO), soulignent l'importance de cette approche multidisciplinaire et proposent des standards concernant la composition et le fonctionnement de ces équipes. L'existence d'une coordination efficace entre ces différents professionnels, souvent assurée par un infirmier dédié, permet d'optimiser le parcours du patient et d'éviter les pertes d'information.


Le bilan nutritionnel occupe une place centrale dans l'évaluation préopératoire. Réalisé par un diététicien spécialisé, il vise à évaluer précisément les habitudes alimentaires du patient, à identifier d'éventuels troubles du comportement alimentaire et à détecter des carences nutritionnelles préexistantes. Ces carences, fréquentes chez les patients obèses malgré un apport calorique excessif, concernent notamment les vitamines D, B12, B9, le fer et certains oligoéléments. Leur identification préopératoire permet une supplémentation ciblée avant l'intervention, réduisant ainsi le risque de dénutrition post-opératoire [3]. Le bilan nutritionnel comprend également une éducation préliminaire concernant les modifications alimentaires qui seront nécessaires après la chirurgie, permettant au patient d'anticiper ces changements et d'évaluer sa capacité à s'y adapter.


Les examens paracliniques constituent un volet essentiel de l'évaluation préopératoire. Ils incluent généralement un bilan biologique complet (hémogramme, bilan hépatique, rénal, métabolique, nutritionnel), une évaluation endocrinienne (recherche d'hypothyroïdie, syndrome de Cushing), des explorations fonctionnelles respiratoires et une polysomnographie en cas de suspicion d'apnée du sommeil, une échographie abdominale (recherche de lithiase biliaire, stéatose hépatique), une fibroscopie œsogastroduodénale (recherche de hernie hiatale, reflux gastro-œsophagien, infection à Helicobacter pylori) et, selon les comorbidités, un bilan cardiologique approfondi. Ces examens permettent non seulement d'évaluer le risque opératoire, mais également d'établir un état des lieux précis des comorbidités, servant de référence pour le suivi post-opératoire.


Les réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP) représentent l'aboutissement de ce processus d'évaluation. Ces réunions rassemblent l'ensemble des professionnels impliqués dans le parcours du patient et permettent une discussion collégiale de chaque dossier. Leur objectif est triple : valider l'indication chirurgicale, déterminer la technique chirurgicale la plus appropriée et définir les mesures d'accompagnement préopératoires spécifiques. La décision finale prend en compte l'ensemble des données recueillies lors des différentes évaluations, mais aussi les préférences du patient, ses antécédents chirurgicaux et son profil de risque global. Dans certains pays, comme la France, la validation en RCP est obligatoire avant toute chirurgie bariatrique et conditionne la prise en charge par l'assurance maladie.


Cette approche multidisciplinaire, bien que logistiquement complexe et consommatrice de ressources, a démontré son efficacité dans l'amélioration des résultats post-opératoires et la réduction des complications. Elle permet une personnalisation du parcours de soins, adaptée aux spécificités et aux besoins de chaque patient, et constitue un gage de qualité et de sécurité dans la prise en charge chirurgicale de l'obésité.

Préparation préopératoire du candidat

La préparation préopératoire constitue une étape déterminante du processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique. Bien plus qu'une simple attente avant l'intervention, cette période représente une opportunité d'optimisation des conditions médicales, nutritionnelles et psychologiques du patient, contribuant significativement au succès de la chirurgie.
La perte de poids préopératoire est souvent recommandée, bien que son caractère obligatoire fasse l'objet de débats. Plusieurs études ont démontré les bénéfices d'une réduction pondérale, même modeste, avant l'intervention. Sur le plan technique, elle facilite le geste chirurgical en réduisant le volume hépatique et la graisse viscérale, diminuant ainsi la durée opératoire et le risque de conversion en chirurgie ouverte. Sur le plan métabolique, elle améliore le contrôle glycémique et réduit le risque de complications périopératoires, notamment infectieuses. Enfin, sur le plan éducatif, elle permet au patient d'expérimenter les modifications comportementales qui seront nécessaires après la chirurgie et témoigne de sa motivation [4]. Différentes stratégies peuvent être employées pour atteindre cet objectif, depuis les régimes hypocaloriques conventionnels jusqu'aux régimes très basses calories ou aux programmes de jeûne intermittent. Certaines équipes préconisent spécifiquement un régime pauvre en glucides dans les jours précédant l'intervention pour maximiser la réduction du volume hépatique. L'ampleur de la perte de poids requise varie selon les équipes, mais représente généralement 5 à 10% du poids initial.


Les modifications comportementales préalables constituent un aspect fondamental de la préparation. Elles visent à initier les changements qui devront être pérennisés après l'intervention et à évaluer la capacité du patient à les mettre en œuvre. Ces modifications concernent principalement les habitudes alimentaires (fractionnement des repas, mastication prolongée, réduction des aliments à forte densité énergétique) et l'activité physique. L'augmentation progressive de l'activité physique en préopératoire présente un double intérêt : elle contribue à la perte de poids et améliore la condition cardiorespiratoire, réduisant ainsi le risque opératoire. De plus, elle favorise le maintien de la masse maigre pendant la phase de perte de poids rapide post-opératoire. L'arrêt du tabac et la réduction de la consommation d'alcool, lorsqu'elles sont nécessaires, font également partie des modifications comportementales préconisées.


L'éducation thérapeutique préopératoire joue un rôle crucial dans la préparation du patient. Elle vise à transmettre les connaissances et compétences nécessaires pour gérer efficacement les suites opératoires immédiates et à long terme. Cette éducation, généralement structurée en modules spécifiques, aborde différents aspects : les principes des techniques chirurgicales et leurs conséquences digestives, les régimes alimentaires post-opératoires (notamment la progression de la texture des aliments), la prévention et la détection des complications, l'importance de la supplémentation vitaminique à vie et l'adaptation de l'activité physique. Des outils pédagogiques variés (livrets d'information, ateliers pratiques, consultations diététiques individualisées, applications numériques de suivi) sont utilisés pour optimiser cette transmission de connaissances. L'implication de l'entourage dans cette démarche éducative est également encouragée, reconnaissant ainsi l'importance du soutien social dans la réussite à long terme.


La préparation psychologique complète ce dispositif préopératoire. Elle s'appuie sur les vulnérabilités identifiées lors de l'évaluation initiale et propose des interventions ciblées : thérapie cognitivo-comportementale pour les troubles du comportement alimentaire, techniques de gestion du stress pour l'alimentation émotionnelle, groupes de parole pour renforcer la motivation et ajuster les attentes. Cette préparation vise également à anticiper les bouleversements psychologiques induits par la perte de poids rapide et les modifications de l'image corporelle. La rencontre avec d'anciens patients opérés, organisée dans le cadre d'associations de patients ou de groupes de soutien, constitue souvent un complément précieux à cette préparation, permettant un échange d'expériences concret et rassurant.


La durée de cette phase préparatoire varie considérablement selon les contextes, de quelques semaines à plusieurs mois, voire années dans certains systèmes de soins. Si une préparation approfondie est généralement associée à de meilleurs résultats post-opératoires, un équilibre doit être trouvé entre l'optimisation de la préparation et le risque de démotivation ou d'abandon lié à une attente excessive.

Considérations éthiques et facteurs socio-économiques

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Au-delà des aspects strictement médicaux et techniques, le processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique soulève d'importantes questions éthiques et socio-économiques qui influencent l'accès aux soins et les décisions thérapeutiques.


Les questions d'équité d'accès aux soins sont au cœur des préoccupations éthiques. Malgré la reconnaissance de l'obésité comme maladie chronique et l'efficacité démontrée de la chirurgie bariatrique, d'importantes disparités persistent dans l'accès à ces interventions. Ces inégalités s'observent tant entre les pays, en fonction de leurs systèmes de santé et ressources économiques, qu'au sein même des pays, entre différentes régions ou groupes socio-économiques. Des études épidémiologiques ont mis en évidence que les patients issus de milieux défavorisés, certaines minorités ethniques ou les habitants de zones rurales accèdent moins fréquemment à la chirurgie bariatrique, malgré une prévalence souvent plus élevée d'obésité sévère dans ces populations [5]. Ces disparités soulèvent des questions fondamentales d'équité et de justice distributive dans l'allocation des ressources de santé.


L'impact des systèmes de santé sur la sélection des candidats est considérable. Les modalités de financement de la chirurgie bariatrique varient significativement selon les pays et les systèmes d'assurance. Dans certains systèmes à couverture universelle, comme en France ou au Canada, la chirurgie bariatrique est intégralement prise en charge pour les patients répondant aux critères d'éligibilité, mais des contraintes budgétaires peuvent limiter le nombre d'interventions réalisables, générant des listes d'attente parfois très longues. Dans d'autres contextes, notamment aux États-Unis, l'accès dépend largement de la couverture assurantielle privée, avec des politiques de remboursement variables et parfois restrictives, incluant des franchises élevées ou des exigences spécifiques (programmes de perte de poids supervisée préalable, évaluations psychologiques multiples). Ces contraintes systémiques conduisent parfois à privilégier les patients présentant les comorbidités les plus sévères ou ceux disposant de ressources personnelles suffisantes pour naviguer efficacement dans le système de soins, au détriment d'une évaluation purement clinique des besoins.


Le consentement éclairé représente un enjeu éthique majeur dans ce processus de sélection. La chirurgie bariatrique, avec ses bénéfices potentiels considérables mais aussi ses risques et contraintes à vie, nécessite un consentement particulièrement approfondi. Le patient doit comprendre non seulement les risques périopératoires, mais également les conséquences à long terme de l'intervention : modifications alimentaires permanentes, nécessité d'une supplémentation vitaminique à vie, risques de complications tardives (carences nutritionnelles, hypoglycémies réactionnelles, troubles digestifs chroniques) et possibilité de reprise pondérale après quelques années. La complexité de ces informations, associée à la vulnérabilité psychologique fréquente des patients souffrant d'obésité sévère et à leurs attentes parfois démesurées vis-à-vis de la chirurgie, rend le processus de consentement particulièrement délicat. Des outils d'aide à la décision, développés spécifiquement pour la chirurgie bariatrique, peuvent faciliter cette démarche en présentant de manière accessible et équilibrée les bénéfices, risques et alternatives thérapeutiques.


Enfin, la balance bénéfice-risque individualisée constitue le principe directeur éthique de la sélection des candidats. Cette évaluation doit intégrer non seulement les données médicales objectives (IMC, comorbidités, risque opératoire), mais également les dimensions psychologiques, sociales et les préférences du patient. Des situations particulièrement complexes peuvent survenir, notamment lorsque le risque opératoire est élevé mais que le bénéfice potentiel est majeur (par exemple pour un patient présentant une obésité extrême avec insuffisance respiratoire), ou lorsque l'indication médicale est relative mais que la demande du patient est forte. Ces dilemmes nécessitent une réflexion éthique approfondie, idéalement dans un cadre collégial intégrant différentes perspectives professionnelles et, si possible, des représentants de patients. L'objectif ultime est d'éviter tant une médecine défensive qui refuserait la chirurgie aux patients les plus à risque, qu'une approche purement consumériste qui répondrait aux demandes sans évaluation rigoureuse des indications.


Ces considérations éthiques et socio-économiques soulignent la complexité du processus de sélection, qui dépasse largement l'application de simples critères cliniques. Elles appellent à une réflexion continue sur les pratiques, les politiques de santé et les valeurs qui sous-tendent les décisions dans ce domaine en constante évolution.

Conclusion

Le processus de sélection des candidats à la chirurgie bariatrique apparaît comme une démarche complexe et multidimensionnelle, allant bien au-delà de l'application de simples critères anthropométriques. Cette sélection rigoureuse, fondée sur une évaluation globale et personnalisée, constitue un déterminant majeur du succès à long terme de ces interventions et de la minimisation des risques associés.


L'approche multidisciplinaire, impliquant divers professionnels de santé aux compétences complémentaires, représente la pierre angulaire de ce processus. Elle permet d'appréhender la multiplicité des facteurs médicaux, nutritionnels, psychologiques et sociaux qui caractérisent chaque patient et influencent le pronostic post-opératoire. La phase préparatoire, loin d'être une simple période d'attente, s'affirme comme une opportunité d'optimisation des conditions préopératoires et d'initiation des changements comportementaux qui devront être pérennisés après l'intervention.


Les enjeux éthiques et socio-économiques qui entourent ce processus de sélection soulignent la nécessité d'une réflexion continue sur l'équité d'accès aux soins, l'allocation des ressources et le respect de l'autonomie des patients. La tension entre la standardisation des critères, nécessaire à une pratique fondée sur les preuves, et la personnalisation de l'approche, indispensable à une médecine centrée sur le patient, caractérise l'évolution contemporaine de ce domaine.


Les perspectives futures du processus de sélection s'orientent vers une médecine de précision, intégrant des biomarqueurs, des profils génétiques et métaboliques, ainsi que des outils d'intelligence artificielle pour affiner la prédiction des résultats et personnaliser davantage les décisions chirurgicales. Parallèlement, l'implication croissante des patients dans la décision thérapeutique, à travers des outils d'aide à la décision partagée et des programmes d'éducation thérapeutique renforcés, devrait contribuer à améliorer l'adéquation entre les attentes des patients et les résultats de la chirurgie.

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