Le rapport au temps est un élément primordial dans la vie et tout le processus de notre existence. Ce n’est pas peu dire, puisque des rythmes circadiens sont générés à l'intérieur de notre corps, par un mécanisme temporel endogène : l'horloge circadienne.
Présente dans les mécanismes de l’humeur, du rythme cardiaque, du niveau de sommeil, de la mémoire ou encore de la température corporelle, l'horloge circadienne est l’enjeu de certains chercheurs et médecins depuis plusieurs années.
De ce constat, la Chronothérapie est née et se développe, en devenant une méthode de moins en moins anecdotique ces dernières années, comme dans le cadre des traitements anticancéreux.
Respecter notre horloge biologique favoriserait la qualité d’un traitement
Chacun peut constater régulièrement que sa propre horloge biologique ne coïncide pas toujours avec celle de ses proches. Temps de sommeil, temps de récupération, effets d’un décalage horaire (Jetlag), tout le monde n’est pas égal face au temps. Jouant un rôle précis au cœur même de nos cellules, cette horloge biologique créée au sein de chaque cellule un rythme biologique : le rythme circadien (cycles biochimiques, physiologiques et comportementaux d’une durée d’environ 24 heures).
Les différentes recherches menées ces dernières années montrent qu’en fonction de son rythme circadien, chacun voit son métabolisme tolérer plus ou moins certaines molécules. La chronothérapie est donc la discipline qui a pour nature de repérer précisément les moments de la journée où un organisme serait le plus à même de recevoir un produit médicamenteux de manière optimale. L’utilisation de la chronothérapie, sur des prises en charge comme les cancers, sert à améliorer l’efficacité des traitements et à réduire au maximum la toxicité des composés médicamenteux tels que la chimiothérapie.
La chrono-chimiothérapie : exemple d’une approche de la chronothérapie
Dans cette voie, le Pr. Francis Levi a élaboré un protocole adapté, la chrono-chimiothérapie. Directeur de l’Unité de chronothérapie à l’Hôpital Paul Brousse de Villejuif et responsable de l’Unité Inserm « Rythmes Biologiques et Cancers » (RBC, Unité clinique de chronothérapie), ce cancérologue est l’un des fers de lance de la chronothérapie. En France, quelques rares établissements de santé (Lille, Bordeaux, Clermont-Ferrand) proposent cette approche, mais son heure ne saurait tarder, puisque son efficacité dans les traitements serait multipliée par deux face à une chimiothérapie classique.
Vivre avec son temps ne sera bientôt plus juste une expression. La chronothérapie a fait l’œuvre de multiples études et les effets des dérèglements de notre rythme biologique sur la santé en intéressent plus d’un. Qu’il s’agisse de Santé Publique sur le thème du travail de nuit et du travail posté, ou des rapports d’études de la NASA (National Aeronautics and Space Administration), les chercheurs se penchent régulièrement sur un élément clef de notre santé.
Bien que moins de 3000 patients ont été traités avec cette approche à l'Hôpital Paul-Brousse à Villejuif depuis les années quatre-vingt dix, la chrono-chimiothérapie devrait prendre son essor dans un avenir plus ou moins proche. Personnaliser le plus possible les traitements pour chaque patient (traitement chronomodulé), nécessite cependant encore d’atteindre l’objectif « de modéliser et de valider les schémas de chronothérapie les mieux tolérés et les plus efficaces, pour mieux soigner les cancers. ».
Misons pour que la Chronothérapie devienne populaire et fasse naître des soutiens auprès des pionniers de cette médecine personnalisée. Sans compter que ses effets sont avérés sur d’autres prises en charge comme le diabète, les maladies cardio-vasculaires ou l’asthme, et permettraient à de nombreux patients et à leur famille de mieux vivre (avec leur temps).
Sources
- Unité de Recherche « Rythmes Biologiques et Cancers » (RBC) Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM) et Université Paris Sud, https://rbc.vjf.inserm.fr
- « Cancers : des traitements sur mesure adaptés à notre horloge biologique », 2009, http://www.inserm.fr/espace-journalistes/cancers-des-traitements-sur-mesure-adaptes-a-notre-horloge-biologique
- « Equipe NACRe 40 : Rythmes Biologiques et Cancers (UMRS 776) », http://www7.inra.fr/nacre/le_reseau_nacre/membres_nacre/40_umrs_776
- « Chronothérapie un traitement selon le rythme biologique du malade », http://www.youtube.com/watch?v=kZ_yHFNwXt0
- « L’horloge des femmes, en avance sur celle des hommes », 2011, http://www.inserm.fr/actualites/rubriques/actualites-recherche/l-horloge-des-femmes-en-avance-sur-celle-des-hommes
- « Circadian rhythms: No lazing on sunny afternoons », Nature 484, 325–326, 19 Avril 2012, doi:10.1038/484325a
- « Circadian rhythms: Depression brought to light », Nature 491, 537–538, 22 Novembre 2012, doi:10.1038/nature11752, http://www.nature.com/nature/journal/v491/n7425/full/nature11752.html
- « Peroxiredoxins are conserved markers of circadian rhythms », Nature 485, 459–464, 24 Mai 2012, doi:10.1038/nature11088, http://www.nature.com/nature/journal/v485/n7399/full/nature11088.html
- « Fatigue, Sleep, and Chronotherapy. Principles of Clinical Medicine for Space Flight », 2008, 10.1007/978-0-387-68164-1_20, NASA Johnson Space Center, Houston, TX, USA, http://link.springer.com/chapter/10.1007%2F978-0-387-68164-1_20
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