Polytraumatisés et place du fibrinogène

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Alors que la prise en charge des polytraumatisés repose en France sur les centres de traumatologie et sur leurs équipes entraînées, des interrogations existent toujours concernant les indications de différentes thérapeutiques.

Fibrinogène : c'est quoi ?

L’utilité d’une transfusion précoce et équilibrée de concentrés de globules rouges (CGR) et de plasmas frais congelés (PFC) est une notion désormais admise par l’ensemble de la communauté médicale.

Les résultats de l’étude CRASH-2 [1,2] ont également montré l’intérêt de l’administration précoce d’acide tranexamique chez les patients en choc hémorragique post-traumatique. Cependant, les indications concernant l’administration de fibrinogène ne sont pas consensuelles.

Le fibrinogène : substrat final de la cascade de coagulation

La coagulation repose sur un équilibre complexe entre des facteurs procoagulants et des facteurs anticoagulants dont le but final est de créer un « clou plaquettaire » pour obturer une brèche vasculaire. Le fibrinogène a un rôle primordial dans ce processus, en permettant, d’une part, les liaisons interplaquettaires via un phénomène calcium-dépendant et en étant, d’autre part, le substrat final de la cascade de coagulation avec la formation de fibrine.

Etude sur fibrinogène et choc hémorragique post-traumatique

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Les auteurs d’une étude, publiée en juin 2018 dans Critical Care, se sont intéressés à l’administration de fibrinogène à des patients présentant un choc hémorragique dans un contexte de traumatisme [3].

Quatre grammes de fibrinogène contre placebo

Dans le cadre de cet essai multicentrique, en double insu avec répartition au hasard contre placebo, quarante-huit patients ont été sériés en deux groupes : le premier bénéficiant d’un traitement conventionnel (transfusion de 4 CGR, 4 PFC) et le second recevant, en plus, 4 grammes de fibrinogène.
Les patients n’ont été inclus que s’ils avaient été victime d’un choc hémorragique ayant imposé l’activation du protocole « choc hémorragique » (commande d’un pack : 4 CGR, 4 PFC, un concentré plaquettaire avec une administration de placebo - NaCl 0,9% - ou de 4 g de fibrinogène pour les patients du groupe traitement). L’un des principaux critères d’exclusion a concerné les patients pris en charge plus de trois heures après le début du traumatisme.
Le critère de jugement principal utilisé dans ce travail a été la possibilité d’effectuer cette prise en charge en moins de 45 minutes après l’arrivée du patient ainsi qu’un dosage de fibrinogène supérieur à 2 g/l deux heures plus tard. Parmi les critères de jugement secondaires analysés, la mortalité après 3 heures, 6 heures, 24 heures et 28 jours, ainsi que la tolérance de l’administration du fibrinogène, sont les plus intéressants.

Des résultats prometteurs mais un petit effectif

Seulement 69 % des patients ont reçu le traitement en moins de 45 minutes

Les résultats montrent que seulement 27 parmi les 39 patients ayant bénéficié du traitement l’ont reçu dans les 45 minutes imparties (soit 69 %, avec un intervalle de confiance à 95 % [IC] : 52-83 %). Par ailleurs, 75 % des patients du groupe traitement ont eu un taux de fibrinogène supérieur à 2 g/l dans les deux heures après l’admission versus 47 % dans le groupe placebo (soit p = 0,10). Concernant la mortalité à 28 jours, les résultats ont objectivé une mortalité de 42,0 % (IC : 25,2-64,0 %) dans le groupe fibrinogène versus 29,2 % (IC : 15,1-51,6 %) dans le groupe placebo.
Un des points positifs est l’absence d’augmentation de la morbidité dans le groupe fibrinogène (nombre de thromboses symptomatiques : 2 dans le groupe fibrinogène versus 3 dans le groupe placebo).
Il est important de noter qu’une limite de cette étude est l’absence d’une parfaite équivalence des deux groupes à l’inclusion avec un groupe fibrinogène constitué de patients un peu plus gravement atteints (avec, notamment, un taux moyen de fibrinogène inférieur de 0,7 g/l à la concentration moyenne des patients sélectionnés dans le groupe placebo).

Cette étude de petit effectif est néanmoins intéressante car elle confirme les difficultés pour des équipes, même entraînées, d’appliquer une procédure rapidement. Cependant, en raison de son petit effectif, de la dissimilitude des groupes et de la faible puissance n’autorisant pas une évaluation précise des critères de jugement secondaires, elle ne permet pas de statuer sur le bénéfice éventuel du fibrinogène. Des travaux futurs utilisant les nouvelles méthodes d’étude du fibrinogène par thromboelastométrie (ROTEM, EXTEM, FIBTEM) pourront probablement, dans un avenir proche, apporter des réponses à ces questions.

 

Sources :

  1. 1. Shakur H, for the CRASH-2 trial collaborators. Effects of tranexamic acid on death, vascular occlusive events, and blood transfusion in trauma patients with significant haemorrhage (CRASH-2): a randomised, placebo-controlled trial. Lancet. 2010 Jul 3;376(9734):23-32.doi: 10.1016/S0140-6736(10)60835-5. Epub 2010 Jun 14.  https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/20554319/
  2. 2. Desforges P. Acide tranexamique : quand un médicament sauve des vies pour quelques euros. Le Guide Santé, 21 mars 2018. https://www.le-guide-sante.org/actualites/medicaments/acide-tranexamique-medicament
  3. 3. Curry N, et al. Early fibrinogen concentrate therapy for major haemorrhage in trauma (E-FIT 1): results from a UK multi-centre, randomised, double blind, placebo-controlled pilot trial.Crit Care. 2018, Jun 18;22(1):164. doi: 10.1186/s13054-018-2086-x. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29914530/
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